Personnalité juridique : un coup contre les libertés syndicales

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Ce mardi, une proposition de loi déposée par le député MR Benoit Piedboeuf sera examinée en commission parlementaire. Derrière une façade technocratique – donner la personnalité juridique aux syndicats – se cache une attaque frontale contre les droits fondamentaux des travailleuses et travailleurs. Et le Conseil d’État vient de le rappeler : cette proposition est incompatible avec la démocratie sociale.

Une manœuvre politique, pas une nécessité juridique

Actuellement, les syndicats belges sont des associations de fait, comme en Allemagne, en Italie ou au Luxembourg – et comme le sont les partis politiques ou d’autres institutions. Cela n’implique ni impunité, ni opacité. Les syndicats assument leurs responsabilités : leurs activités sont encadrées par le droit civil et pénal. Non seulement ils n’échappent pas aux sanctions légales, mais leurs comptes sont déjà rigoureusement tenus et contrôlés – y compris par l’ONEm, en ce qui concerne les allocations de chômage.

Ce qui échappe au regard du public, ce sont les caisses de grève, et c’est bien normal : leur montant constitue une donnée stratégique dans le bras de fer social. Imposer leur publication, comme le permettrait la personnalité juridique, reviendrait à désarmer les syndicats face au patronat.

Le vrai but : affaiblir le rapport de force syndical

Qui réclame cette réforme ? Le MR, la N-VA, l’Open VLD et le Vlaams Belang, avec le soutien appuyé des organisations patronales. Leur objectif ? Mettre les syndicats à genoux.

Attribuer la personnalité juridique aux syndicats aurait trois conséquences majeures :

  1. Rendre publiques les caisses de grève, affaiblissant ainsi leur pouvoir de négociation.
  2. Permettre des poursuites financières massives contre les syndicats en cas de grève ou d’action ayant des répercussions économiques.
  3. Exclure les syndicats de la concertation sociale s’ils refusent ce statut.

Ce n’est pas une réforme technique. C’est une volonté de briser le contre-pouvoir syndical, de criminaliser l’action collective, et de bâillonner les travailleurs et travailleuses.

Un rejet clair du Conseil d’État

Le Conseil d’État a tranché : cette proposition viole les principes fondamentaux du droit belge, européen et international. Elle constitue une entrave grave aux libertés syndicales, notamment en matière de droit d’organisation, de négociation collective et de grève. Le 14 mai 2025, l’avis rendu sur la proposition du MR a réitéré les critiques déjà adressées à un projet similaire du Vlaams Belang en 2021. Autrement dit : cette loi est non seulement dangereuse, elle est illégale.

Défendre les syndicats, c’est défendre la démocratie

Les syndicats sont la première organisation de masse en Belgique. Ils sont un rempart démocratique face à l’arbitraire économique et aux abus du pouvoir. S’attaquer à leur existence même, c’est fragiliser l’ensemble de la société.

La FGTB n’a pas à rougir de son fonctionnement. Elle n’a pas besoin d’un statut imposé qui servirait à la museler. 

Ce qu’elle défend, ce sont les droits collectifs, la solidarité, l’émancipation.