Travail de nuit : selon le gouvernement, un million de travailleurs sont soudainement occupés dans la distribution

La décision du gouvernement de ne faire débuter le travail de nuit qu’à partir de minuit dans le secteur de la distribution est absurde d’un point de vue économique. De plus, le MR et la N-VA se servent de cette décision pour organiser un recul social pour encore plus de travailleurs.

Le travail de nuit est mauvais pour la santé. C’est scientifiquement prouvé. Les personnes qui travaillent de nuit se trouvent constamment en situation de décalage horaire. Même à court terme, le travail de nuit peut avoir de graves conséquences sur la santé physique et mentale des travailleurs : risque accru de cancer et de diabète de type 2, troubles du sommeil et troubles digestifs, problèmes hormonaux, irritabilité, troubles de la concentration, etc.

Parallèlement, le travail de nuit engendre également des conséquences sociales. Il est en effet difficile, voire impossible, d’organiser sa vie privée et prévoir quelque chose avec ses amis et sa famille est loin d’être évident. « Si vous refusez une invitation à trois reprises, on ne vous invitera plus la fois d’après », témoigne un travailleur.

« On ne joue pas avec la santé des gens », souligne Thierry Bodson, président de la FGTB. « Le travail de nuit doit rester l’exception, cela ne doit pas être un instrument de flexibilité généralisée ». 

C’est pourquoi, jusqu’à l’entrée en fonction de la coalition Arizona, le travail de nuit était compensé par un meilleur salaire (primes) avec des régimes de sortie spécifiques. Le gouvernement Arizona poursuit toutefois, ici aussi, le carnage.

Un recul social

Actuellement, il est question de travail de nuit entre 20 heures et 6 heures. Le gouvernement souhaite limiter le travail de nuit aux prestations fournies entre minuit et 5 heures. Une telle mesure représente un recul social brutal et une attaque contre le pouvoir d’achat. Les futurs travailleurs de nuit perdront ainsi cinq heures de droit à une prime de nuit. Les contrats en cours qui sont maintenus ne tiennent pas compte de la réalité : l’arrivée et le départ de nouvelles entreprises et le transfert de contrats. Les travailleurs qui sont actuellement occupés dans du travail de nuit ne sont pas préservés.

« Le gouvernement laisse entendre que cette mesure a peu d’impact, mais en réalité, cela implique une diminution directe du salaire et des conditions de travail plus mauvaises pour des centaines de milliers de travailleurs », explique Bodson.

Le cadre proposé par le gouvernement De Wever est plus strict que ce qu’appliquent actuellement les pays voisins. Quel est le but de la Belgique ? De remporter la course aux plus mauvaises conditions de travail ?

Absurde sur le plan économique

Enfin, notons qu’il est absurde de permettre le travail de nuit dans toute une série de secteurs qui actuellement ne sont nullement confrontés à la concurrence de l’étranger et qui ne sont liés ni de près ni de loin à la distribution ou à l’e-commerce. Pensons par exemple aux commissions paritaires auxiliaires 100 et 200, qui englobent aussi les inspections automobiles, les jeux de hasard, le nettoyage industriel, la publicité, les institutions financières, les blanchisseries, etc. Au total, cela concerne près d’un million de travailleurs dans différents secteurs où le travail de nuit pourra être imposé sous peu.

Pour la seule commission paritaire 200, plus de 500.000 travailleurs pourraient se voir imposer du travail de nuit. De plus, cela touche presque exclusivement des travailleurs de petites entreprises, sans délégation syndicale. Ces travailleurs sont livrés à la pression et à l’arbitraire de leur employeur.

« Nous assistons ici à une normalisation insidieuse du travail de nuit dans des secteurs où cela n’est absolument pas nécessaire », explique Bodson. « C’est précisément là où les travailleurs sont le moins protégés que la flexibilité est imposée ».

L’argument de rendre les entreprises belges « concurrentielles » par rapport à l’étranger est clairement fallacieux. Le véritable objectif qui se cache là-derrière est celui d’un énième cadeau aux employeurs au détriment des travailleurs.

Le message de la FGTB est clair : le travail de nuit ne peut être envisagé qu’avec un solide encadrement par la concertation sociale et cela doit rester une exception, plutôt que de devenir la règle. La flexibilité a un prix : celui de bonnes conditions de travail et d’une fin de carrière réaliste.

« Nous ne sommes pas opposés à toute forme de souplesse dans l’organisation du travail », conclut Thierry Bodson « mais nous excluons toute flexibilité uniquement au détriment des travailleurs ».