Assurance chômage en France des frontalières et frontaliers : non au changement de « l’offre raisonnable d’emploi », danger sur le règlement européen

La réglementation d’assurance chômage française change au 1er avril 2025 sous l’effet de l’agrément par le gouvernement français de l’accord du 14 novembre 2024. Cet accord entre organisations patronales et syndicales représentatives en France, non signé par la CGT, prévoyait de revoir les dispositions concernant l’indemnisation chômage des travailleurs et travailleuses frontalier-e-s, notamment en Suisse, au Luxembourg et en Belgique.
A la suite de l’action commune de nos organisations syndicales de part et d’autre des frontières, nous avions enregistré une première victoire en décembre : le gouvernement français avait décidé de ne pas agréer un article instaurant un coefficient réducteur de l’indemnité, sur la base d’un ratio entre les salaires moyens du pays d’emploi et du pays de résidence, la France. Ce coefficient était manifestement illégal au regard du droit européen.
Or, le gouvernement français a publié le 21 mars un autre décret révisant l’offre dite « raisonnable d’emploi », qui se base désormais sur le salaire habituellement pratiqué dans la zone géographique de résidence. Pour satisfaire les demandes du patronat français, pourtant responsable de la disparition de nombreux emplois industriels dans les zones frontalières, et pour contourner la même contestation d’illégalité, le texte ne fait pas référence aux frontalières et aux frontaliers mais cette dissimulation ne trompe personne : elle pourrait même être une nouvelle preuve d’illégalité.
Par ailleurs, les gouvernements européens ont repris une négociation pour modifier certaines dispositions du règlement européen 883/2004 précisément sur ce point de coordination des régimes d’assurance chômage. Certains gouvernements veulent d’ailleurs, en échange d’évolution sur les droits assurance chômage, revoir à la baisse les protections des travailleuses et des travailleurs détaché-e-s. Si nous approuvons l’objectif que le pays d’emploi assume entièrement la charge financière des allocations chômage générées par la perte d’emploi, nous nous opposons à ce que la réglementation du pays d’emploi soit appliquée aux personnes ayant perdu un emploi frontalier ou détaché : les réglementations étant très diverses et les services très différemment dimensionnés, ce serait source de nouveaux problèmes concrets et importants pour les frontalières et les frontaliers, notamment français-e-s ayant travaillé en Suisse, au Luxembourg et en Belgique.
Nos organisations appellent donc le gouvernement français à renoncer au décret manifestement illégal du 21 mars.
Elles demandent en outre aux gouvernements européens de ne modifier le règlement européen 883/2004 que dans le renforcement des droits des travailleuses et des travailleurs frontalier-e-s et détaché-e-s, sans changer le lieu d’établissement des droits. Les droits des travailleuses et des travailleuses doivent être renforcés, pas démantelés.
Nous saluons la mobilisation récente des nombreuses travailleuses et nombreux travailleurs concernés et les appelons à nouveau à la plus grande vigilance pour défendre leurs droits. Unies, unis, nous sommes fortes et forts !