Les libertés syndicales enchaînées au Panama

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« Violations systématiques des droits ». Tel est le verdict, pour le Panama, de l’Indice des droits dans le monde de 2025. Chaque année, la Confédération syndicale internationale (CSI) évalue l’état des droits et libertés fondamentaux des travailleurs dans le monde entier. Et le Panama fait partie des 7 pays où cet indice s’est détérioré au cours de l’année écoulée.
Répression contre les syndicats au Panama
Au Panama, les attaques contre le mouvement syndical se sont intensifiées au cours de l’année écoulée. En 2024, le Sindicato Único Nacional de Trabajadores de la Industria de la Construcción y Similares de Panamá (SUNTRACS) et ses dirigeants ont été poursuivis par l’État. En février 2025, des milliers d’ouvriers du bâtiment affiliés au SUNTRACS ont organisé une manifestation nationale. Le gouvernement du président José Raúl Mulino a réagi par une violente intervention policière : 514 travailleurs ont été arrêtés, parmi lesquels plusieurs mères allaitantes.
Actuellement, les importants dirigeants syndicaux Jaime Caballero de SUNTRACS et Francisco Smith, Secrétaire général de SITRAIBANA (La Industria del Banano, Agropecuario y Empresas Afines) sont détenus dans une prison de haute sécurité, où sont incarcérés les criminels les plus dangereux du pays. Ils sont accusés de blanchiment d’argent. En outre, les comptes bancaires du SUNTRACS ont été gelés et ses avoirs saisis. Ces actions nourrissent un climat de peur et de stigmatisation.
De nombreuses protestations contre les dernières décisions du gouvernement
Les grandes mobilisations au Panama ont débuté en 2023, avec des manifestations contre l’ouverture d’une grande mine. Les syndicats n’étaient pas seuls à protester : des écologistes et de nombreux jeunes ont activement participé au mouvement de protestation. Ils ont réussi à pousser la Cour suprême à se prononcer suite au refus du gouvernement de retirer le contrat minier. Finalement, la Cour a déclaré le contrat inconstitutionnel.
Les actions récentes, en 2025, se sont surtout concentrées sur « la loi 462 » qui réforme le système de sécurité sociale (Caja de Seguro Social). Cette loi vise à remplacer le modèle de solidarité existant pour les pensions par un système mixte. Le lobby patronal cherche ainsi à affaiblir le système solidaire et à réduire les droits des travailleurs.
Le président José Raúl Mulino et son gouvernement réagissent violemment aux manifestations, qualifiant les protestataires de criminels et d’opportunistes. Selon eux, ces actions de protestation seraient illégales.
En tant que FGTB, nous avons également participé début juin à la Conférence internationale du travail, où nous avons eu l’occasion de nous entretenir avec Marco Andrade de CONUSI (l’une des principales fédérations syndicales du Panama).
Nous lui avons posé la question suivante : Pendant ce congrès, une session spéciale d’une demi-journée a été consacrée à la situation au Panama. Qu’est-ce que cela signifie pour vous ?
Énormément. Parce que c’est exactement ce que nous étions venus chercher ici à l’OIT : la solidarité du mouvement syndical international. Et nous l’avons obtenue.
Grâce à cette session spéciale, nous avons pu expliquer au monde ce qui se passe actuellement au Panama. Nous avons décrit comment nos autorités utilisent le ministère public pour réprimer la protestation sociale et criminaliser les personnes qui élèvent la voix.
Certains camarades (parmi lesquels Saúl Méndez, Secrétaire général de SUNTRACS) ont été contraints de se réfugier à l’ambassade de Bolivie. Le gouvernement a également décidé de paralyser le syndicat en gelant ses comptes bancaires, sur lesquels sont versées les cotisations syndicales des travailleurs.
Le ministre a même pris une résolution obligeant les entreprises à verser directement les cotisations syndicales au ministère, sous forme de chèques. Cela représenterait un contrôle sans précédent des fonds syndicaux et limiterait fortement les libertés syndicales. Pour nous, cela prouve également l’existence d’une alliance entre l’Etat et le secteur bancaire.
Au Panama, les garanties constitutionnelles ne sont plus respectées. La liberté syndicale est écrasée, la Constitution ignorée, et la démocratie remplacée par un régime autoritaire. Le Panama ressemble de plus en plus à une dictature, soutenue par des puissances étrangères, notamment les États-Unis.
📺 Regardez l’interview complète ici : https://youtu.be/UtFB5TblcLM
Le 3 juin, la FGTB a mené, en collaboration avec la CSC, une action symbolique devant l’ambassade du Panama pour rappeler que ces attaques constituent de graves violations des libertés syndicales.
Signez la pétition de la Confédération syndicale internationale : petitions.ituc-csi.org/suntracs-en