De la pression au travail aux possibilités d’apprentissage limitées : le travail faisable dans l’économie des services

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Au printemps 2023, la Fondation Innovation & Travail, le centre de recherche de la SERV, a mené la septième édition du baromètre flamand du travail faisable. Depuis 2004, ce baromètre mesure tous les trois ans la faisabilité des emplois en Flandre. Actuellement, 51,8 % des salarié·es occupent un emploi sans problèmes de faisabilité. Une légère amélioration par rapport aux années précédentes, principalement due à davantage de possibilités de formation et à une motivation accrue. En revanche, en matière de stress au travail et d’équilibre vie privée-vie professionnelle, il reste du chemin à parcourir pour atteindre l’objectif de 60 % d’emplois faisables.

Les différences entre secteurs sont par ailleurs importantes. Cela ressort à nouveau des récentes analyses sectorielles portant sur le secteur financier, le commerce de gros et de détail, et les entreprises de titres-services. Cet article présente brièvement les principaux résultats.

Secteur financier

La situation en matière de travail faisable dans le secteur financier s’est dégradée au cours des trois dernières années. En 2023, 47,4 % des salarié·es du secteur financier occupent un emploi faisable, contre 55,5 % en 2019. Les principaux facteurs négatifs sont le stress professionnel et le déséquilibre entre vie professionnelle et vie privée. 40 % des travailleurs et travailleuses souffrent de stress au travail, et 17 % éprouvent des difficultés à concilier vie privée et travail. Ces pourcentages sont plus élevés que la moyenne sur le marché du travail flamand. Une forte pression au travail, des heures supplémentaires non récupérées et de longs trajets domicile-travail en sont notamment la cause.

Il y a toutefois aussi des aspects positifs. En matière d’autonomie et de travail routinier, le secteur affiche de bien meilleurs résultats que la moyenne flamande, ce qui favorise les possibilités d’apprentissage. Le secteur financier bénéficie d’une longue tradition en matière de formation, ce que confirment les chiffres : en 2023, seulement 6,1 % des salarié·es déclarent manquer de possibilités de formation.

Commerce de gros et de détail

Dans le commerce de gros et de détail, 50,6 % des salarié·es ont un emploi faisable – un statu quo par rapport à 2004. Le principal problème dans ce secteur est le stress au travail : un·e salarié·e sur trois en souffre, et 13,6 % présentent des symptômes de burn-out. Mais c’est surtout le manque de possibilités de formation qui interpelle : un·e salarié·e sur cinq estime ne pas avoir suffisamment d’occasions de se former. Le secteur obtient ainsi des résultats bien inférieurs à la moyenne flamande, malgré certaines améliorations ces dernières années.

Cela peut notamment s’expliquer par une proportion plus élevée de travail routinier, mais aussi par le fait que les emplois du secteur ne suivent pas la tendance positive en matière d’autonomie. Les résultats sont particulièrement préoccupants dans le commerce de détail : 27,4 % des salarié·es y dénoncent un manque d’autonomie, dont 11,3 % un manque aigu.

Entreprises de titres-services

Dans les entreprises de titres-services, les problèmes sont multiples et mettent fortement sous pression la faisabilité du travail. Ainsi, 38 % des salarié·es y souffrent de stress au travail et 10,6 % rencontrent des difficultés à concilier travail et vie privée. Mais ce sont surtout la démotivation et le manque de possibilités de formation qui posent problème : 37,8 % du personnel déclarent un manque de motivation et 51,7 % estiment ne pas avoir assez d’occasions de se former. En 2023, seules une personne sur quatre dans ce secteur a suivi une formation complémentaire, contre 57 % sur l’ensemble du marché du travail flamand. Les chiffres de l’absentéisme y sont également nettement plus élevés que dans les autres secteurs en Flandre, et le fait de pouvoir travailler jusqu’à la pension y semble de moins en moins réalisable. Une forte pression au travail, une proportion très élevée de tâches routinières et une charge physique importante expliquent en grande partie ces résultats.

Plus de formations et un plan ambitieux pour le travail faisable

Même si des progrès ont été réalisés ces dernières années, de nombreux problèmes subsistent dans le secteur des services, mettant la faisabilité du travail sous pression. Si nous voulons parvenir à davantage d’emplois faisables, des mesures importantes devront être prises dans les différents secteurs. Il est essentiel d’accorder davantage d’attention aux possibilités de formation, de réduire la pression au travail et d’assurer une plus grande variété des tâches.

Il est donc incompréhensible que la ministre de l’Emploi, Zuhal Demir, limite l’accès au congé flamand de formation aux seules personnes travaillant au moins à 80 %. Ce congé permet actuellement aux salarié·es de suivre, de leur propre initiative, une formation pendant leurs heures de travail, tout en offrant une compensation à l’employeur. À partir du 1er septembre 2025, toute personne travaillant moins de quatre jours par semaine en perdra le droit. Dans les secteurs du commerce de détail et des titres-services, les contrats à temps partiel sont déjà très répandus, et les occasions de formation y sont rares.

Dans le cadre de la concertation sociale, nous continuons de revendiquer un plan ambitieux pour un travail faisable pour tous les travailleurs et travailleuses. Des possibilités de formation suffisantes en sont un élément essentiel. L’accent doit être mis sur une approche collective, ancrée dans la base, avec une implication maximale des représentant·es des travailleurs.

Auteur : Elisabeth.Geenen@vlaamsabvv.be