Avis du Conseil Supérieur pour la Prévention et la Protection au Travail sur le TRI 3.0

Publié le

Dans le cadre de l'accord de coalition, le gouvernement De Wever-Bouchez souhaite adapter la procédure de réintégration. Ces adaptations comprennent  des tâches supplémentaires pour le médecin du travail et un suivi et une activation plus rapides des malades de longue durée. 

La possibilité pour les travailleurs de demander un trajet de réintégration préventif était l'un des rares points positifs. Le projet d’AR modifiant le Code du bien-être au travail a été soumis pour avis au Conseil Supérieur pour la Prévention et la Protection au Travail (CSPPT), qui a rendu un avis positif à l'unanimité le 26 juin. Malgré une orientation globalement négative des modifications proposées, l'avis a permis d'obtenir une série d’avancées importantes d’un point de vue syndical.

Les grandes lignes du TRI 3.0

  • il est clairement indiqué que la communication entre le médecin du travail, le médecin conseil et le médecin traitant sur l’état de santé d’un travailleur peut désormais se faire via la plateforme TRIO ;
  • une visite de pré-reprise du travail à la demande de l’employeur est désormais également possible ;
  • la possibilité pour le travailleur de demander une adaptation du travail pour éviter qu’il tombe malade (trajet préventif) est explicitement repris dans le Code ;
  • l’employeur est obligé de maintenir un contact avec le travailleur en incapacité de travail ;
  • le trajet de réintégration est adapté sur une série de points : l’employeur pourra, à partir du début de l’incapacité de travail, débuter un trajet de réintégration avec l’accord du travailleur et l’employeur doit, à partir de 8 semaines d’incapacité de travail demander une estimation du potentiel de travail au médecin du travail, à la suite de quoi, au plus tard 6 mois après le début de l’incapacité de travail, un trajet doit être commencé s’il est effectivement question de potentiel de travail ; les invitations du médecin du travail doivent avoir lieu par envoi recommandé, et si le travailleur ne répond pas à l’invitation, cette information doit être communiquée au médecin conseil (en vue d’un éventuelle sanction) ; l’employeur examine désormais aussi les possibilités concrètes d’un autre travail auprès d’autres employeurs, et il y a un renvoi vers les services régionaux de l’emploi si le travailleur ne peut plus travailler chez son propre employeur.

Victoire syndicale 

Malgré la teneur négative des modifications proposées dans l'accord de coalition, qui visent principalement à contrôler et sanctionner individuellement les malades de longue durée, l'avis rendu contient un certain nombre de points positifs pour nous :

  • L’importance d’un équilibre entre la prévention primaire, secondaire et tertiaire et le déploiement efficace des médecins du travail comme acteur de prévention ;
  • Le rôle du médecin du travail en tant qu'acteur de la prévention ne peut être rempli efficacement que s'il peut jouir de la confiance de tous les acteurs de l'entreprise. C'est pourquoi il faut éviter que le médecin du travail soit perçu comme un médecin de contrôle qui doit vérifier la justification des absences pour cause de maladie. Certaines dispositions du PAR pourraient nuire à ce rôle de confiance. Il convient d'éviter cela ;
  • Répétition de notre position contre les sanctions dans le cadre de la politique de réintégration (pour nous, les sanctions contre des personnes malades sont bien sûr le plus grave) ;
  • L’importance de l’accord explicite de l’employeur pour l’échange des informations (médicales) ;
  • Les employeurs qui souhaitent recourir à la procédure de visite de pré-reprise du travail doivent d'abord contacter le travailleur (jusqu'à présent, seuls les travailleurs pouvaient recourir à cette procédure, qui était également considérée comme une procédure de réintégration informelle ; le projet d'AR l'autorise également aux employeurs, mais notre crainte était que ceux-ci se servent de cette procédure pour contrôler les travailleurs malades) ;
  • Le PAR introduit un nouveau trajet de réintégration préventif que le travailleur peut demander. L'employeur peut refuser cette demande, mais nous demandons dans l'avis de motiver ce refus ;
  • La notion de potentiel de travail doit être clarifiée et harmonisée dans d'autres législations (par exemple dans le cadre de la législation AMI, qui prévoit également l'estimation du potentiel de travail).

L'avis rendu doit être pris en considération par le ministre de l'Emploi lors de la modification du projet d'AR, mais il ne s'agit que d'une première étape dans notre lutte syndicale contre les mesures de l’accord de coalition qui, dans leur ensemble, ne permettront pas d'atteindre les résultats souhaités, à savoir le retour durable au travail des travailleurs malades. 

Auteurs : Anna.Makhova@abvv.beNiels.Morsink@abvv.be