COP26// Messages de Glasgow

25 novembre 2021
Actualité

Tous les regards (et tous les espoirs) étaient tournés vers Glasgow, où se déroulait le 26e Sommet des Nations-Unies pour le climat (COP26). Sacha Dierckx, économiste à la FGTB, était sur place et nous livre ses impressions au quotidien et ses conclusions.

25 novembre 2021

Quelques jours après mon retour, voici mon évaluation de l'accord conclu à la COP26. Pour commencer par un point positif, il est de bon ton que l'accord confirme l'objectif de 1,5°C. Moins positif, c'est que les plans climatiques nationaux actuels (les « NDC » -Nationally Defined Contributions) sont insuffisants. Le monde est sur la voie d'une élévation de température catastrophique d'environ 2,4°C d'ici 2100 ! Et encore faut-il que ces plans soient mis en œuvre! Il existe de nombreuses vagues promesses d’émissions nettes nulles sans aucun plan clair. L'accord stipule également – à demi-mots – que le charbon devrait être moins utilisé. C'est la première fois qu'un combustible fossile est explicitement mentionné dans un accord international sur le climat.

Il y a aussi de très petites avancées dans le domaine de la solidarité internationale, mais on ne peut pas parler de franc succès. Le financement international du climat est essentiel. Les pays pauvres sont très vulnérables au changement climatique et, contrairement aux pays riches, ceux-ci n’en sont pas responsable. C'est donc une question de justice qu'ils soient aidés dans leur politique climatique et leur protection contre les conséquences du changement climatique.

L'accord de Glasgow "regrette" que la promesse de Paris de 100 milliards de dollars aux pays en développement d'ici 2020 n'ait été tenue et "exhorte" les pays riches à honorer celle-ci "de toute urgence", ainsi que celle de doubler la part qui va à la protection contre les effets du dérèglement climatique. En outre, aucun accord n'a été trouvé sur un fonds d'indemnisation des catastrophes climatiques dans les pays en développement. Ce sont principalement les États-Unis et l'UE qui se sont opposés à ce fonds.

En termes de transition juste, celle-ci est mentionnée à plusieurs reprises dans l'Accord de Glasgow. Mais sans qu’elle ne soit contraignante. La transition juste semble malheureusement aussi être un concept parapluie, que chacun peut interpréter à sa manière, alors qu’il devrait concerner le monde du travail et la protection sociale, et mettre les travailleurs au centre du processus.

L'accord est-il suffisant ? Malheureusement, loin de là ! Les mobilisations et la pression de la société ont permis de maintenir vivant l’objectif des 1,5 degrés de réchauffement maximal. Mais beaucoup reste à faire pour que des mesures concrètes soient prises par les gouvernements. C'est à ce niveau que nous devons lutter pour une transition juste et une société solidaire qui ne laisse personne de côté.

9 novembre 2021

La deuxième semaine de la COP26 a commencé avec un weekend chargé. Samedi a eu lieu la grande marche pour le climat, avec plus de 100.000 participants, dans le cadre de la Journée mondiale d'action pour la justice climatique. Les syndicats y était présents en masse, et la Coalition pour le climat était de la partie.

Du côté de la Belgique, le climat est aussi à la une de l’actualité. Jeudi, le gouvernement flamand a proposé un plan climat pour réduire les émissions de CO2 de 40 % d'ici 2030. Non seulement c'est trop peu, mais le volet social du climat a été "oublié". Le plan n'inclut pas d'investissements majeurs ni dans les transports publics, ni dans des logements sociaux économes en énergie, ni dans la rénovation collective ou les énergies renouvelables.

La Région flamande joue principalement un rôle de retardateur en matière de politique climatique et bloque également de nombreux engagements belges au niveau international. Par exemple, dans son paquet de mesures climatiques Fit for 55, la Commission européenne a proposé que la Belgique réduise ses émissions de CO2 de 47 % d'ici 2030 (moins que les pays voisins et les pays scandinaves). Cependant, le ministre flamand Zuhal Demir (N-VA) a déclaré samedi que dans l'intérêt du Limbourg la Belgique doit exiger que cet objectif soit réduit, prétextant que la Belgique doit faire trop d'efforts par rapport à des pays comme la Bulgarie et la Roumanie (dont le revenu par habitant est 4 ou 5 fois moindre qu’en Belgique)… Manifestement, la solidarité internationale est un vain mot.

Le climat n'est pas seulement une question d'inégalité entre les pays, mais aussi d'inégalité à l'intérieur des pays. Ce sont les grands actionnaires qui déterminent le cours des entreprises et sont donc principalement responsables des activités polluantes de ces entreprises. Les travailleurs, eux, n’ont pas grand-chose à dire à ce sujet dans une économie capitaliste.

En outre, il existe aussi une grande différence quand on regarde l'empreinte écologique de la consommation. Les riches consomment beaucoup plus que les pauvres, aussi bien dans les pays occidentaux que dans les pays en développement. Oxfam vient de publier une nouvelle étude montrant que le mode de vie des 1% les plus riches provoque plus du double de toutes les émissions de gaz à effet de serre dues à la consommation des 50% les plus pauvres du monde. Même le Financial Times écrit que des taxes élevées sur la consommation de luxe des riches ne suffisent pas, et que les gouvernements devraient également imposer des limites strictes, par exemple, aux vols et aux piscines privés.

Plus que jamais, la question climatique est une question de classe, et la crise climatique est une crise d'inégalités. Ce n’est pas le climat qui doit changer, c’est le système qui doit changer !

5 novembre 2021

La première semaine de la COP26 est presque terminée. Mercredi, j’ai participé au piquet de grève des ramasseurs de déchets en grève à Glasgow, où nous sommes allés montrer notre solidarité.

À ce stade, il est trop tôt pour tirer les conclusions de ce Sommet, mais dans certains domaines, les choses bougent. Le 2 novembre, la High Ambition Coalition a publié une déclaration dans laquelle elle demande une fois de plus de limiter le réchauffement climatique à 1,5°C et d’accroître le financement climatique aux pays en développement. Ce qui manquait dans cette déclaration était une référence à la transition juste. Mais en fin de compte, jeudi, les modalités pour "soutenir les conditions d’une transition juste au niveau international" sont apparues dans la déclaration. Et il faut admettre que celle-ci n'est pas mauvaise. Les pays promettent de :

  • soutenir les travailleurs lors de la transition vers de nouveaux emplois ;
  • placer le dialogue social au cœur des plans pour une transition juste ;
  • élaborer des stratégies économiques plus larges ;
  • promouvoir le travail décent ;
  • veiller à ce que les droits humains soient respectés tout au long de la chaîne de production mondiale ;
  • rendre compte des efforts en faveur d'une transition équitable dans les Contributions nationales (NDCs).

La Belgique est l'un des signataires de la déclaration, ce qui signifie que la FGTB pourra utiliser cette déclaration pour rappeler au gouvernement ses engagements.

Une autre nouvelle positive est la déclaration pour une transition équitable dans le secteur de l'énergie en Afrique du Sud. Dans cette déclaration, la France, l'Allemagne, le Royaume-Uni, les États-Unis et l'UE s'engagent à aider l'Afrique du Sud à accélérer sa transition énergétique, en prêtant attention et en soutenant les travailleurs et les communautés touchés par la fermeture progressive des mines de charbon. Lors d'une réunion entre la Coalition climat et la ministre de l'Énergie Tinne Van der Straeten, j'ai souligné le fait que la transition équitable dans le secteur de l'électricité sud-africain est non seulement digne d'être soutenue, mais aussi qu’elle représente un bon exemple pour d'autres pays.

Le Président sud-africain Ramaphosa a également écrit sur la transition juste dans le journal britannique Financial Times : "La seule manière pour que la transition soit réussie est qu'il y ait un large engagement pour une transition qui soit juste et qui ne laisse personne sur le bord de la route. Les besoins des travailleurs et des communautés dans les industries et les zones géographiques qui seront touchées par une telle transition doivent être soigneusement pris en compte. Les syndicats, les entreprises et le gouvernement doivent élaborer des programmes de requalification, d'emploi, de compensation pour la perte des moyens de subsistance et d'autres formes de soutien afin que les travailleurs soient les principaux bénéficiaires de notre passage vers un avenir plus vert."

Il faut encore applaudir l'incroyable discours de Mia Mottley, la Première ministre de la Barbade. Je recommande de regarder l'intégralité de son discours, mais j’ai retenu ici quelques phrases : "Si notre existence a un sens, alors nous devons agir dans l'intérêt de tous nos peuples, qui dépendent de nous. Et si nous ne le faisons pas, nous laisserons la voie de la cupidité et de l'égoïsme semer les graines de notre destruction commune."

2 novembre 2021

Mardi, le Premier ministre Alexander De Croo a pu s'adresser à la COP26 et donc au monde entier. Outre les habitudes quotidiennes - réunion de la Confédération syndicale internationale (CSI) via Zoom, auto-test quotidien, passage des contrôles de sécurité - la journée a donc été largement dominée par ce que notre Premier ministre allait dire.

Le point positif de ce discours est que De Croo a souligné l'urgence de la crise climatique. "Il n'y a vraiment pas de temps à perdre. Nous sommes en retard sur le calendrier et devons accélérer le rythme", a déclaré le Premier ministre.

Mais pour moi, en ce qui concerne la Belgique, il y a encore beaucoup de Bla Bla Bla, pour citer l'activiste climatique Greta Thunberg. Nous sommes toujours parmi les plus mauvais élèves de la classe en matière de politique climatique. Nous ne sommes pas membre de la High Ambition Coalition, une coalition de pays œuvrant pour une politique climatique plus ambitieuse. Nous n'avons pas pu annoncer (faute d'engagements de la part des régions) un montant concret que la Belgique versera au titre du financement climatique international pour aider les pays en développement à lutter et à s'adapter au dérèglement climatique. "Il est maintenant temps d'agir", a déclaré M. De Croo. Des actes, pas des mots, c'est ce que nous chantons avec la FGTB, mais nous voyons encore trop peu de ces actes dans la politique belge.

Ensuite, M. De Croo a surtout parlé d'innovation et de solutions technologiques. Bien sûr, nous accueillons favorablement les nouvelles technologies et les innovations plus durables qui aident l'économie, les travailleurs et le climat. Mais compter uniquement sur des innovations technologiques incertaines est dangereux et constitue une politique climatique défaillante. Il existe de nombreuses solutions qui sont aussi socialement justes et qui peuvent faire la différence aujourd'hui.

Troisièmement, le concept d'une "transition juste" ou d'une "transition équitable" était complètement absent du discours. Une telle transition juste place les travailleurs au centre, en accordant une attention particulière au dialogue social et à la participation des travailleurs, à une meilleure protection sociale, à des emplois verts de qualité, à l'éducation et à la formation, ainsi qu'à l'investissement public dans des solutions socialement justes. Avec son modèle social (notre sécurité sociale !) et son histoire de dialogue social, la Belgique pourrait proposer un exemple. Nous pourrions montrer aux autres pays comment concevoir une transition équitable avec la participation des travailleurs. Mais nous n'avons même pas les prémices d'un plan pour une transition juste au niveau national. Et donc, malheureusement, nous ne faisons pas non plus la promotion de notre modèle social ni du dialogue social au niveau international.

Les jours suivants seront marqués par d'autres discussions et ateliers avec des collègues syndicalistes d'autres pays (sous la devise "Travailleurs du monde, unissez-vous !").

1er novembre 2021

Dimanche, je suis parti en train pour le sommet annuel sur le climat - mieux connu cette année sous le nom de COP26 - à Glasgow.

Lundi était donc le premier jour en tant que participant à la COP26. Les obligations administratives - autotest, envoi du résultat via le site web du service public de santé britannique NHS, passage de la sécurité, retrait du badge au guichet - se sont déroulées sans problème. Les premiers jours ont vu la présence de leaders mondiaux. Des discours ont été prononcés par le Premier ministre britannique Boris Johnson (malheureusement pas par le socialiste Jeremy Corbyn, qui a perdu les élections fin 2019), le président américain Joe Biden et le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres.

La réunion quotidienne avec les délégués syndicaux des autres pays, coordonnée par la Confédération syndicale internationale, a eu lieu dans les bâtiments du syndicat britannique Unite. J'ai pu rencontrer mes collègues internationaux et coordonner avec eux la manière dont nous pourrions nous battre à cette COP pour une transition juste qui n’exclurait personne du processus.

J'ai pu rencontrer le Premier ministre belge Alexander De Croo. Il doit également s'exprimer ici, et il a consacré une demi-heure à la Coalition pour le climat, qui regroupe plus de 90 organisations de la société civile belge, dont la FGTB et les autres syndicats belges. C'était une discussion constructive. Mais malgré tout, avec la Coalition pour le climat, nous restons sur notre faim. La Belgique ne joue pas un rôle de premier plan dans les négociations internationales. Sur le plan interne, il n'existe pas encore d'accord sur la manière de répartir les efforts visant à réduire les émissions de CO2 de la Belgique de 47 % d'ici à 2030. Et même si le gouvernement fédéral a augmenté sa contribution au financement climatique international pour les pays en développement, parce que les régions sont à la traîne, il n'y a toujours pas de chiffre interfédéral belge à ce stade.

Le gouvernement flamand, en particulier, continue de faire de l'obstruction, même si des pourparlers sont en cours là aussi pour intensifier les efforts. C'est en partie grâce aux grèves des jeunes de Youth for Climate (j'ai également rencontré Anuna De Wever et co. ici à Glasgow) et aux mobilisations à Bruxelles, comme la dernière manifestation pour le climat du 10 octobre, à laquelle la FGTB a participé en tant que membre de la Coalition pour le climat. De l'aveu du Premier ministre lui-même : « sans la pression de la base, et la pression dans le débat social, le climat ne serait jamais un thème aussi important pour les différents gouvernements ».

 

Sacha DIERCKS, depuis Glasgow, pour la FGTB.