Enfants influenceurs, le CNT propose un cadre strict

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Le 15 juillet dernier, le Conseil National du Travail (CNT) a rendu un avis au sujet des « kidfluencers », les mineurs d’âge exerçant des activités d’influence sur les réseaux sociaux . Dans cet avis, les interlocuteurs sociaux se positionnent en faveur d’un cadre légal strict, afin de protéger au mieux ces enfants influenceurs.

Contexte

En Belgique, le travail des enfants est interdit. Pour certaines activités, comme celles d'acteurs, de figurants ou de modèles, des dérogations individuelles peuvent être délivrées par l’administration. Ces exceptions sont énumérées de manière limitative dans la loi sur le travail de 1971. Une activité d’influence exercée par un jeune de moins de 15 ans nécessite, en théorie, la demande d'une dérogation. En pratique, pour les « kidfluencers », une telle exception n'est presque jamais demandée car il existe actuellement un flou juridique autour de ce phénomène, qui n’apparait pas de manière explicite dans les motifs donnant droit à une dérogation. 

Ces dernières années, plusieurs propositions de loi ont été déposées au Parlement afin de cadrer mieux le phénomène. Jusqu'à présent, elles n'ont pas donné lieu à une modification de la réglementation. Le CNT s’est dès lors saisi du sujet afin d'encourager un encadrement de ces pratiques, qui peuvent s’avérer dangereuses pour le bien-être des enfants.

Les recommandations portées dans l’avis

Concrètement, le CNT suggère de modifier la loi (l’article 7.2 de la loi du 16 mars 1971 sur le travail), afin d’y faire apparaitre clairement les activités d’influence comme motif de demande d’une dérogation. La définition de ce que les “activités d’influence” comprennent devrait, selon le CNT, reposer sur les éléments essentiels suivants : 

  • une activité lucrative ; 

  • la présence d’un enfant; 

  • une diffusion par le biais d’un support technologique ou audiovisuel. 

La FGTB a insisté, lors des discussions, pour que les activités des enfants figurants dans les contenus créés par leurs parents soient également incluses, ce que nous avons donc obtenu. A l’initiative des organisations de défense des travailleurs, l’avis souligne aussi « qu’une attention particulière doit être accordée aux enfants plus vulnérables, notamment les enfants les plus jeunes et les enfants en situation de handicap (mental) ou qui ont plus de difficulté à s’exprimer ». 

L’avis mentionne ensuite la nécessité « de maintenir la protection de la rémunération en espèces de l’enfant influenceur (art. 7.13 de la loi du 16 mars 1971 sur le travail). Ceci implique que les revenus de l’enfant sont en principe intégralement versés sur un compte bloqué à son nom jusqu’à sa majorité ». 

L’avis identifie enfin deux points d’attention supplémentaires :

Le premier concerne les activités menées par l’intermédiaire d’un agent. Identifiant un risque de report de responsabilité, l’avis souligne « que les agents d’enfants influenceurs doivent respecter et faire respecter toutes les règles de protection des enfants influenceurs, dont la durée et la fréquence des activités et la protection des revenus, même si ces agents n’ont pas introduit la demande de dérogation ». 

Le second concerne le rôle, potentiellement ambivalent, des parents. Ceux-ci sont en effet responsables de demander la dérogation, mais peuvent également être les « donneurs d’ordre » dans la relation de travail. Le CNT précise donc que « dans la mesure où des parents interviennent comme employeurs de leurs enfants ou comme intermédiaires avec un agent d’influenceurs ou une entreprise qui occupe leurs enfants, cette relation relève alors pour partie de la sphère du travail » et que la législation trouvera donc à s’y appliquer.

Enfin, afin que le cadre légal qui sera défini soit effectivement appliqué, l’avis consacre une importante section au rôle de prévention et de contrôle du SPF Emploi. Ce point était particulièrement mis en avant, lors des discussions, par les organisations représentatives des travailleurs.

Auteur : marie.hanse@fgtb.be