Contrats de travail intérimaire journaliers successifs : la balle est désormais dans le camp du gouvernement !

Publié le

L’évaluation unanime du Conseil national du travail est sans appel : les contrats journaliers successifs et leurs contournements plongent toujours plus de travailleurs dans la précarité. Les interlocuteurs sociaux ont parlé. Au gouvernement, désormais, de prendre ses responsabilités.

En mars 2025, nous avons présenté notre proposition pour l’évaluation, à réaliser par les interlocuteurs sociaux, du mécanisme de responsabilisation des contrats de travail intérimaire journaliers successifs (voir l’article : Les contrats journaliers successifs de travail intérimaire : il reste encore beaucoup à faire !). Nous avions alors conclu que des mesures correctives apparaissaient clairement nécessaires pour éviter que le mécanisme de responsabilisation, après un impact initial significatif sur le nombre de contrats journaliers successifs, ne devienne inefficace. Nous avions alors énuméré les mesures qui nous semblaient les plus efficaces. Entre-temps, les discussions au Conseil national du travail ont pris fin : le mardi 16 décembre, un avis unanime contenant l’évaluation a été rendu.

Les voies de contournement se développent

Dans l’avis, les constats suivants sont formulés noir sur blanc :

  • L’utilisation de contrats de travail intérimaire de 2 jours a augmenté de 29,66 % en 2 ans (2024 par rapport à 2022, dernière année précédant l’introduction du mécanisme de responsabilisation) ;

  • Le nombre de contrats journaliers successifs hors intérim a augmenté de 24,20 % au cours de la même période.

Ces chiffres montrent clairement que ces deux voies de contournement se sont fortement développées depuis l’entrée en vigueur du mécanisme de responsabilisation, en 2023.

Il va sans dire que la lutte contre les employeurs qui plongent inutilement les travailleurs intérimaires dans l’incertitude totale d’une occupation via des contrats journaliers (successifs) n’a pas pour objectif de les inciter à passer simplement à des contrats de travail intérimaire de deux jours ou à des contrats journaliers successifs hors intérim. Les contrats de travail intérimaire de deux jours, et a fortiori les contrats journaliers successifs hors intérim, plongent pratiquement les travailleurs dans la même incertitude que les contrats de travail intérimaire journaliers (successifs). Incertitude qui n’est pas sans impact sur le bien-être mental et physique des travailleurs concernés.

Il est donc urgent d’intervenir pour mettre fin à ces voies de contournement. La responsabilisation des employeurs qui imposent des contrats journaliers successifs et des contrats de deux jours, tant dans le cadre du travail intérimaire qu’en dehors, doit être la prochaine étape logique. Cela générerait, en outre, des recettes bienvenues pour notre sécurité sociale.

Le recours à différentes agences d’intérim se développe de manière exponentielle

Des avis unanimes antérieurs sur le mécanisme de responsabilisation avaient déjà souligné que le recours à différentes agences d’intérim devait également être couvert par le mécanisme (le recours au même intérimaire chez le même utilisateur via différentes agences d’intérim). L’évaluation montre que cette pratique malveillante connaît une expansion exponentielle.

Le nombre de travailleurs intérimaires employés par le même utilisateur via plus d’une agence d’intérim a augmenté de 18 % en 2024 par rapport à 2023.

Le nombre d’utilisateurs ayant engagé le même travailleur intérimaire via différentes agences d’intérim a, quant à lui, augmenté de 30,63 % en 2024 par rapport à 2023.

Dans l’avis publié le 16 décembre 2025, la demande d’adapter le mécanisme de façon à contrer cette voie de contournement est donc explicitement réitérée.

Le gouvernement doit intervenir

Les interlocuteurs sociaux ont fait leur travail et procédé à l’évaluation demandée. Il appartient désormais au gouvernement de tenir compte de cette évaluation et de prendre les mesures nécessaires pour rendre le mécanisme de responsabilisation plus efficace, et de veiller à ce que les contrats d’un jour et de deux jours hors intérim soient également concernés. Car tout le monde mérite un emploi stable offrant de la sécurité.

Auteur : Lander.vanderlinden@abvv.be