Analyse de l’accord de gouvernement De Wever-Bouchez

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L’accord de gouvernement De Wever-Bouchez est une douche froide pour les travailleurs et travailleuses, les allocataires sociaux et, surtout, les femmes. Les épaules les plus larges, en revanche, restent épargnées. Voici une analyse en bref.
Réinsertion des malades de longue durée
L’accord de gouvernement De Wever-Bouchez prévoit une politique stricte vis-à-vis des malades de longue durée. Les personnes sans contrat de travail mais ayant un "potentiel de travail" seront obligées de s'inscrire comme demandeurs d'emploi, et les sanctions seront à nouveau durcies. Cette politique semble principalement axée sur les économies et le retour rapide des malades sur le marché du travail, sans tenir compte de leur état de santé et de leurs besoins.
La vision sous-jacente de la droite est bien connue : les malades de longue durée sont perçus comme un coût plutôt que comme des personnes ayant besoin de temps et de soins pour se rétablir. Pourtant, beaucoup sont tombées malades en raison de mauvaises conditions de travail, d’une pression excessive ou d’un burn-out. Les contraindre à travailler sans une réintégration durable ne fera qu'aggraver leur situation.
Politique étrangère
Sur ce point, l'accord de coalition reste assez vague. La réduction de 25 % du budget de la coopération au développement est frappante.
L'accord de coalition du gouvernement De Wever-Bouchez a une vision économique très unilatérale de l'Europe, presque entièrement axée sur la compétitivité, la productivité et la déréglementation en faveur des entreprises. Les aspects sociaux sont à peine abordés. Une occasion manquée de faire de l'UE non seulement une Union forte, mais aussi une Union socialement juste.
Pouvoir d’achat
Le pouvoir d’achat des travailleurs et travailleuses devrait augmenter, grâce à la hausse du montant exonéré d’impôt et à l’augmentation des salaires minimums. Ce sont des éléments positifs, certes, mais comme la hausse du montant exonéré s’applique à tout le monde, il s’agit d’une mesure très coûteuse qui profite aussi aux hauts revenus.
Le gouvernement De Wever-Bouchez maintient la loi de 1996 sur la norme salariale, empêchant ainsi les syndicats de négocier de meilleurs salaires pour les travailleurs et travailleuses. Cela signifie que les salaires sont artificiellement maintenus à un niveau bas, même dans les secteurs qui présentent une marge suffisante pour des augmentations.
L'indexation automatique des salaires est provisoirement préservée. Cependant, si les partenaires sociaux ne parviennent pas à élaborer un avis sur une réforme de l’index d’ici fin 2026, le gouvernement pourra intervenir unilatéralement et réduire progressivement le système et ses effets.
Les épaules les plus larges épargnées
Le principe selon lequel « les épaules les plus larges portent les charges les plus lourdes » est totalement absent de l'accord de gouvernement De Wever-Bouchez. Ce sont surtout les travailleurs et les allocataires sociaux qui se retrouvent en première ligne, tandis que les entreprises et les grandes fortunes sont largement épargnées.
Pas moins de 8,7 milliards d’euros d’économies sont réalisées sur le dos des travailleurs et des allocataires sociaux. Les actifs bénéficient d’une légère compensation via une réforme fiscale de 3,5 milliards d’euros, mais celle-ci ne concerne ni les pensionnés, ni les demandeurs d’emploi, ni les malades de longue durée. Ce sont donc les plus vulnérables qui subissent l’essentiel des coupes budgétaires.
Parallèlement, les entreprises reçoivent 1,72 milliard d’euros de soutien supplémentaire, sans avoir à fournir aucune garantie de création d’emplois. Les grandes fortunes ne contribuent qu’à hauteur de 1,42 milliard d’euros, et les fraudeurs bénéficient d’une amnistie pour blanchir leur argent noir. Par ailleurs, 2,3 milliards d’euros d’économies sont imposés aux demandeurs d’emploi.
Marché du travail
Cet accord de gouvernement semble tout droit sorti des programmes du MR et de la N-VA, avec des mesures unilatérales qui favorisent principalement les employeurs et fragilisent davantage les travailleurs.
En effet, la politique du marché du travail du gouvernement De Wever-Bouchez met l'accent sur plus de flexibilité et un travail plus intense pour les travailleurs, sans offrir en contrepartie une protection sociale suffisante ou un réel dialogue social.
Les mesures poussent les travailleurs vers des horaires plus tardifs, avec moins de sursalaire et donc plus de précarité, ce qui augmentera encore la pression sur l’assurance maladie. Les accords sociaux sont modifiés et affaiblis sans concertation, réduisant ainsi les possibilités pour les syndicats de conclure des accords ou d’exiger des compensations. Mettre l’accent sur les négociations individuelles entre salarié et employeur affaiblit la position des travailleurs. Cela va à l’encontre de la jurisprudence récente de la Cour de justice de l’Union européenne, qui reconnaît que les travailleurs sont la partie la plus vulnérable dans les relations de travail.
Limitation des allocations de chômage dans le temps
Le gouvernement De Wever-Bouchez annonce la limitation des allocations de chômage à deux ans. Cela signifie tout simplement que plus de 120 000 personnes perdront leur droit aux allocations. Des personnes qui ne retrouveront pas forcément un emploi dans la foulée ! Cette mesure symbolique de la droite ne fera qu’accroître l’insécurité et le risque de pauvreté. De plus, les allocations seront réduites plus rapidement (dégressivité).
Le gouvernement présente cela comme une économie nécessaire, mais aucune solution structurelle n’est proposée pour aider durablement les demandeurs d’emploi. Au lieu d’investir dans la création d’emplois, la formation et l’accompagnement, les chômeurs sont avant tout sanctionnés financièrement.
Climat, énergie et mobilité
Le maintien des objectifs climatiques est positif. Le gouvernement ne remet pas en cause les objectifs climatiques européens pour 2030 et 2050 et reconnaît la nécessité d'une transition durable.
Cependant, les points négatifs sont :
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Pas d'objectif clair en matière de réduction des émissions de CO₂ ;
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Peu de mesures concrètes et aucun plan pour une transition équitable ou la participation des travailleurs ;
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L'accent est mis unilatéralement sur la technologie comme solution, sans consultation sociale ni prise en compte des travailleurs ;
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Aucune protection des travailleurs contre les impacts climatiques ;
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Etc.
La politique énergétique du gouvernement BDW-Bouchez met trop l'accent sur l'énergie nucléaire et les forces du marché, alors que des solutions structurelles à la pauvreté énergétique et au contrôle public de l'énergie font défaut. Les consommateurs bénéficient de quelques mesures de protection, mais les entreprises sont favorisées sans conditions sociales.
La politique de mobilité annoncée dans l'accord de coalition combine quelques mesures positives pour les transports publics, mais met l'accent sur la privatisation, l'augmentation des coûts pour les passagers et l'insécurité pour les travailleurs du rail. Les travailleurs et les personnes à faible revenu risquent d'être perdants, tandis que les projets d'infrastructure coûteux et les voitures à salaire fossile sont favorisés.
Pensions
Les plans de pension du gouvernement De Wever frappent durement les travailleurs et les fonctionnaires, augmentant l'incertitude, en particulier pour les femmes et les personnes ayant une carrière atypique. Cela revient à travailler plus longtemps pour une pension moindre, avec des économies qui touchent principalement les plus vulnérables.
Les femmes et les fonctionnaires sont les plus durement touchés, tandis que les indépendants et les revenus les plus élevés sont largement épargnés. Il s'agit d'une pure opération d'austérité, alors que les pensions dans notre pays comptent déjà parmi les plus basses d'Europe.
Les femmes en première ligne
En raison de l’augmentation de la flexibilité du travail et de la réduction simultanée des mécanismes de protection et de contrôle pour le travail à temps partiel, les femmes sont encore plus exposées à l’exclusion, aux inégalités de revenus et à la discrimination sur le marché du travail.
Par exemple :
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L’interdiction du travail de nuit est supprimée. Or, le secteur de la distribution est majoritairement féminin ;
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La suppression du jour de fermeture obligatoire augmentera la pression au travail, alors que les femmes sont déjà surreprésentées parmi les malades de longue durée ;
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La généralisation des flexi-jobs à tous les secteurs risque d’avoir un impact considérable dans des domaines comme les soins, l’enseignement et la garde d’enfants ;
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La condition de carrière pour bénéficier des emplois de fin de carrière passe de 25 à 35 ans, un seuil que de nombreuses femmes n’atteindront jamais ;
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L’accès à la pension minimale sera calculé sur la base des prestations effectives, ce qui pénalisera les femmes ;
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Suppression de la pension de survie et de la pension en cas de divorce ;
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Enfin, la réforme visant à dépénaliser totalement l’avortement est à nouveau mise de côté.
De plus, la réforme de la loi dépénalisant l'avortement se retrouve au frigo.
Réduction de la pauvreté
Au lieu de s'attaquer à la pauvreté de manière structurelle, le gouvernement De Wever-Bouchez adopte une approche dure et contrôlante qui pousse les plus faibles de la société à s'enfoncer encore plus dans les difficultés. L'accent n'est pas mis sur le soutien, mais sur la coercition et les sanctions.
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